La valorisation du patrimoine sénégalais

Le projet Muslab, mis en place par l’Institut français du Sénégal et le musée Théodore Monod, permet de valoriser le patrimoine matériel et immatériel sénégalais, allant des objets d’art aux savoirs botaniques et à l’innovation numérique.
Après plus de trois ans de collaboration, l’Institut français du Sénégal et le musée Théodore Monod ont présenté les résultats du projet Muslab, une coopération muséale innovante. Le partenariat a consisté à former le personnel des musées dans les domaines de la scénographie, de la gestion d’exposition, de la médiation, du partage des données et des connaissances des expositions, en plus de la numérisation.
‘’Le Département des musées de l'Ifan, avec l'ambassade et l'Institut français, a travaillé de concert pour assurer pendant trois ans une série de formations aux agents des musées partis en France. Les formateurs des musées français sont souvent venus ici et il y a eu des échanges. Il y a aussi un apport technologique, car du matériel de numérisation et de photographie a été offert au musée Théodore Monod. Cela a permis de numériser des milliers d’objets que nous allons désormais intégrer dans le musée numérique’’, a déclaré le conservateur du musée Théodore Monod, El. H. Malick Ndiaye. La collaboration a d’ailleurs permis de mettre en place ce musée numérique (Micro-Folie).
En outre, trois sites internet des trois musées de l'Ifan ont été créés dans ce cadre. ‘’Ce partenariat se poursuit. Mais l’essentiel réside dans la transmission des savoirs et les échanges de compétences technologiques. Le transfert de technologies institutionnelles n'est ni linéaire ni unilatéral. Lorsque les apprenants acquièrent quelque chose, ils le transforment et l’adaptent à leur propre contexte’’.
Serigne Habib Diagne, enseignant à l’AFI/UE, a évoqué l'utilisation de la technologie dans ce projet. ‘’Durant notre enfance, nous allions au lycée Blaise Diagne pour jouer au foot. Chaque fois que nous passions devant le musée de l’Ifan, nous pensions que c’était un environnement réservé aux grands scientifiques. Nous n’imaginions pas pouvoir le découvrir et y apprendre. C’est par une activité d'initiation culturelle que nous avons eu l'opportunité d’y entrer’’, a-t-il indiqué.
Cette anecdote l’a grandement inspiré dans sa collaboration. Il a alors eu l’idée de rendre ce musée plus attrayant. Pour y parvenir, il a eu recours à la technologie afin permettre aux jeunes de mieux comprendre les collections. ‘’Lors des visites, nous constatons qu'il y a nombreux visiteurs devant, par exemple, une vitrine, sans savoir comment l’interpréter. L’expérience est statique, ce qui peut ennuyer les jeunes. D’où l’idée d'apporter notre touche technologique’’, a précisé Serigne Habib Diagne.
En effet, dès l’entrée du musée, un espace pédagogique accueille les enfants pour éveiller leur curiosité. Ils sont ensuite initiés à la technologie avant d’apprendre le rôle d’un musée, la valeur des objets d'art et les modalités d’interaction.
‘’Nous avons entrepris de numériser les œuvres. Ainsi, nous avons réalisé la numérisation tridimensionnelle de l’intégralité de l'espace et des objets, accompagnée d’une documentation augmentée. Lorsqu’un objet exposé ne vous est pas familier, une visite virtuelle vous offre la possibilité d’activer un bouton pour obtenir une vidéo explicative’’, a détaillé M. Diagne.
Parallèlement, une importance capitale a été accordée aux espaces verts. Les femmes de Sunu Tool ont travaillé avec le musée Théodore Monod pour numériser les espèces naturelles et fournir des explications. De son côté, Kémi Bassène, représentant du Revacs, souligne que dans la valorisation du patrimoine sénégalais, son équipe cherche à intégrer l'artisanat traditionnel au design moderne et à l’art contemporain.
Les linguistes participent également au projet. Celui-ci leur permet de valoriser les langues nationales. ‘’Initialement, les linguistes ne disposaient pas d'enregistreurs, mais avec la démocratisation des technologies, il a été possible d’acquérir des appareils de qualité. La question de l’archivage pérenne des données collectées sur le terrain s’est alors imposée’’, a souligné Anne-Marie Diagne. Actuellement, les innovations technologiques facilitent tant les enregistrements que les traductions vers les langues européennes.
L'objectif de cette coopération muséale est non seulement de préserver le patrimoine, mais aussi de le rendre accessible, compréhensible et appropriable. Elle doit transformer les musées en espaces d'expérimentation et de connaissances, mais aussi de rencontres et de participation. Enfin, elle incite à imaginer de nouveaux récits et usages.
BABACAR SY SEYE